Lumière pulsée : une technologie prometteuse pour la stérilisation de DM ?
Innovante et respectueuse de l'environnement, la décontamination par lumière pulsée est rapide, athermique, et ne laisse pas de résidus. Le Groupe Icare nous explique ici son principe et ses applications potentielles parmi lesquelles figure la stérilisation de certains types de dispositifs médicaux.
Par Edith Filaire, Anaïs Georgeault et Christian Poinsot du Groupe Icare
La stérilisation et la décontamination sont essentielles dans divers domaines industriels comme les dispositifs médicaux, la pharmacie, les cosmétiques et l'industrie agro-alimentaire. Aux côtés de méthodes telles que la vapeur, l'oxyde d'éthylène et le peroxyde d'hydrogène, la lumière pulsée est une technologie émergente permettant principalement la décontamination microbienne de surface. Elle consiste à émettre un rayonnement électromagnétique à large spectre (100 à 1100 nm) sous la forme d'une série d'impulsions courtes (flashs) mais de forte intensité, produite par une lampe à arc contenant des gaz inertes comme le xénon (Cassar et al., 2021). Cette technologie permet la destruction de bactéries, levures, moisissures, spores et virus. Les taux de réduction varient d'une étude à une autre, sans qu'il soit possible de les quantifier pour l'instant car les conditions de traitement sont différentes et souvent non comparables (Elmnasser et al., 2007).
L'intérêt croissant pour la lumière pulsée est attribué à ses caractéristiques non thermiques (sur de courtes durées), non chimiques et non ionisantes, et au fait que cette technique permet d'obtenir une réponse antimicrobienne rapide. Le traitement est caractérisé par un certain nombre de paramètres tels que la tension appliquée aux bornes des lampes, le nombre et la fréquence de flashs émis, la fluence (qui représente l’énergie accumulée sur 1 cm2 de la surface durant le traitement), la durée et la fréquence des impulsions, ainsi que la distance de la source lumineuse. La rugosité de la surface à décontaminer, la présence d'un emballage, mais aussi le type de micro-organismes (forme végétative, spore) sont aussi des paramètres à prendre en compte (Ricciardi et al., 2021).
Action de la lumière pulsée sur les micro-organismes
L’application d’un ou plusieurs flashs semble induire la destruction totale et irréversible des micro-organismes (contrairement aux UV continus qui, dans certains cas, présentent un effet réversible en raison de leur faible intensité (Wekhof, 2000)). Néanmoins, cette destruction dépend du type de micro-organismes et de leur stade de développement (Kramer et al., 2017). Les spores de moisissures sont plus résistantes que les bactéries à Gram positif, elles-mêmes plus résistantes que les bactéries à Gram négatif (Farrell et al., 2010). De plus, Farkas (2007) rapporte un lien entre la résistance de certaines moisissures aux UV et leur couleur (pigment noir), la survie des spores fongiques étant due à la mélanine qu'elles contiennent.
Le mécanisme germicide prédominant est causé par des effets photo-chimiques qui se produisent lorsque le rayonnement ultraviolet interagit avec les structures de l'ADN. Il se forme alors, entre autres, des dimères de pyrimidine, qui inhibent la formation de nouveaux brins d’ADN durant la réplication ainsi que la réparation de ceux-ci, ce qui entraîne la mort du micro-organisme (Bolton et Linden, 2003).
De nombreuses études définissent l'absorption des UV comme la cause principale de l'inactivation des micro-organismes par la lumière pulsée. Cela signifie que la seule différence entre cette technologie et l'émission continue d'UV est la réduction du temps de traitement. Néanmoins, il apparaît également que les effets photo-thermiques et photo-physiques contribuent à l'inactivation microbienne.
Les effets photo-thermiques se manifestent par des longueurs d'onde correspondant aux régions infra-rouges (IR), induisant une forte élévation en température du micro-organisme avec, pour conséquence, des dommages et une rupture du contenu cellulaire (Xu et Wu, 2016). L'effet photo-physique a également été rapporté comme étant un acteur de l'inactivation microbienne. Les micro-vibrations résultant des impulsions répétées de courte durée (μs-ms) provoquent des dommages membranaires, des fuites d'organites cellulaires, et à terme la lyse cellulaire (Ramos-Villarroel et al., 2012).
Des applications dans le secteur du DM ?
La technologie de la lumière pulsée est particulièrement bien adaptée à la décontamination des aliments et des surfaces en contact avec les aliments. Le procédé a d'ailleurs été accepté pour le traitement de produits alimentaires, par trois organismes :
- la FDA (Food and Drug Administration, USA) pour le traitement de tous les aliments jusqu’à 12 J.cm-² en 1996,
- la FAO (Food and Agriculture Organization), en 2001,
- l’AFSSA en 2009 comme procédé de décontamination microbiologique de surface des produits de panification.
La décontamination par lumière pulsée présente également un fort potentiel dans d’autres domaines incluant l’eau, les emballages cosmétiques et pharmaceutiques et certains dispositifs médicaux tels que les emballages primaires en plastique souple de solutés de perfusion, les prothèses mammaires ou encore les lentilles intraoculaires.
Enfin, parmi les nouveaux domaines d'application de la lumière pulsée figure la lutte contre le SARS-CoV-2 avec une utilisation sur les surfaces de contact dans les établissements de santé (Bello-Perez et al., 2022).
Réferences
- Bello-Perrez M, Esparza I, De la Encina A, Bartolome T, Molina T, Sanjuan E, Falco A, Enjuanes L, Sola I, Usera F (2022). Pulsed-xenon ultra violet light highly inactivates human coronaviruses on solid surfaces, particularly SARS-CoV-2. Int J Environn Res Public Health 19 (21): 13780.
- Bolton JR, Linden KG (2003) Standardization of methods for fluence (UV dose) determination in bench scale UV experiments. Journal of Environmental Engineering, 129, 209–215.
- Cassar, J.R., Bright, L.M., Patterson, P.H., Mills, E.W., Demirci, A., 2021. The efficacy of pulsed ultraviolet light processing for table and hatching eggs. Poultry Sci. 100, 100923 https://doi.org/10.1016/j.psj.2020.12.021.
- Elmnasser, N.; Guillou, S.; Leroi, F.; Orange, N.; Bakhrouf, A.; Federighi, M. Pulsed-light system as a novel food decontamination technology: A review. Can. J. Microbiol. 2007, 53, 813–821.
- Farkas (2007) Physical methods of food preservation. In Food microbiology: fundamentals and frontiers. Ed: Doyle MP, Beuchat LR. Chapter 32. 685-712.
- Farrell, H.P., Garvey, M., Cormican, M., Laffey, J.G. and Rowan, N.J. (2010) Investigation of critical inter-related factors affecting the efficacy of pulsed light for inactivating clinically relevant bacterial pathogens. J Appl Microbiol 108, 1494–1508.
- Kramer B, Wunderlich J, Muranyi (2017) Recent findings in pulsed light. Journal Applied Microbiology. 122, 830-856.
- Ramos-Villarroel, A.Y.; Aron-Maftei, N.; Martín-Belloso, O.; Soliva-Fortuny, R. The role of pulsed light spectral distribution in the inactivation of Escherichia coli and Listeria innocua on fresh-cut mushrooms. Food Control 2012, 24, 206–213.
- Ricciardi FE, Plazzotta S, Conte A, Manzocco L (2021) Effect of pulsed light on microbial inactivation, sensory properties and protein structure of fresh ricotta cheese. LWT 139, 110556.
- Xu, W., Wu, C. The impact of pulsed light on decontamination, quality, and bacterial attachment of fresh raspberries. Food Microbiol. 2016, 57, 135–143.
- Wekhof, A.; Trompeter, F.J.; Franken, O. Pulsed UV disintegration (PUVD): A new sterilisation mechanism for packaging and broad medical-hospital applications. In Proceedings of the First International Conference on Ultraviolet Technologies, Washington, DC, USA, 14–16 June 2001.