Focus sur l’étude des phénomènes de dégradation des matériaux des DM
Les matériaux utilisés dans la fabrication des dispositifs médicaux peuvent générer des produits de dégradation au cours du temps. Ils doivent alors faire l’objet d’investigations, notamment dans le cadre de l’évaluation de la biocompatibilité des matériaux (norme ISO 10993). Filab nous l'explique.
Par Emmanuel Buiret et Thomas Gautier du laboratoire d'analyse chimique Filab
Les métaux, céramiques ou polymères à usage médical sont susceptibles de se dégrader et de libérer des produits issus de cette dégradation lorsqu'ils sont exposés à leur environnement biologique. Dans ce contexte, il est important de s'assurer de leur niveau de tolérabilité pour la sécurité de certains dispositifs médicaux, en menant des investigations permettant de les identifier et de les quantifier.
La norme ISO 10993-9 regroupe les différents principes généraux pour l’évaluation et la conception d’études de dégradations des matériaux utilisés dans les Dispositifs Médicaux - le terme « dégradation » signifiant ici « décomposition du matériau ». Elle traite uniquement des produits de dégradation résultant d'une altération chimique du dispositif dans le corps humain, et non d’une contrainte mécanique ou d’usure. Il est également important de noter que ce référentiel ne fait pas allusion aux composés extractibles et relargables étudiés dans la partie 18 de la norme ISO 10993.
La méthode d'évaluation de la dégradation varie en fonction de la nature du matériau étudié, du dispositif médical et de son emplacement anatomique.
Trois normes complémentaires à l’ISO 10993-9 et spécifiques aux matériaux non résorbables décrivent ces conditions :
- l’ISO 10993-13 : identification et quantification de produits de dégradation de dispositifs médicaux à base de polymères,
- l’ISO 10993-14 : identification et quantification des produits de dégradation des céramiques,
- l’ISO 10993-15 : identification et quantification des produits de dégradation issus des métaux et alliages.
Les études techniques qui y sont décrites consistent à caractériser les matériaux d’origine, puis à simuler les dégradations des matériaux dans des conditions bien définies. De manière générale, les normes décrivent deux méthodes d’essais permettant de générer potentiellement des produits de dégradation des matériaux :
- un essai de dégradation accéléré, réalisé dans un environnement dont les conditions sont les plus défavorables possibles (on parle alors de worst case),
- un essai de simulation réalisé dans un environnement proche de celui d’utilisation du dispositif (conditions réelles).
Les méthodes de caractérisation sont également décrites et relatives à chaque typologie de matériaux :
- pour les polymères : GPC, DSC, ATG, FTIR, Py-GC/ MS…,
- pour les céramiques : granulométrie Laser, BET, diffraction à rayons X, MEB-EDX, ICP…,
- pour les alliages métalliques : SEO, ICP, XPS, TOFSIMS, MEB…
Elles sont très généralement complétées par d’autres techniques permettant d’accéder à des caractéristiques thermiques, morphologiques, de surface ou encore de composition chimique.
Différentes manifestations de dégradation
En premier lieu, une dégradation d’un matériau pourra être constatée lorsque qu’un changement de masse et/ou de couleur interviendra entre le matériau d’origine et celui après essai vieillissement. Une dégradation peut également être observée lorsque des débris visuels sont caractérisés dans les solvants d’immersion. Dans ce deuxième cas, une nouvelle série d’analyses pourra être appliquée pour identifier la nature des débris (par exemple par des techniques chromatographiques comme la GC-MS, la LC-MSMS, la LC-QTOF/MS, l’ICP, la microscopie infrarouge,…).
Les produits de dégradation identifiés et quantifiés constituent la base de l'évaluation biologique en conformité avec les normes ISO 10993-1, ISO 10993-17 et, le cas échéant, des études toxicocinétiques en conformité avec l'ISO 10993-16.