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Une norme pour valider les instructions de nettoyage de DM réutilisables
Avec les directives de la norme ANSI/AAMI ST98, les fabricants de DM réutilisables disposent désormais d'un cadre règlementaire clair pour valider les instructions de nettoyage destinées aux utilisateurs de leurs produits. Cette norme s'appuie notamment sur le niveau de criticité du DM.
Par Frédéric Cadoret, directeur d'études en microbiologie chez NAMSA
Lors des phases de développement d'un nouveau dispositif médical réutilisable ou de la modification d'un dispositif déjà existant, il est indispensable de valider l’efficacité des instructions de retraitement que le fabricant va indiquer dans sa documentation à l’attention des utilisateurs. Pour ce faire, ces instructions d’utilisation (IFU) doivent décrire toutes les étapes nécessaires au retraitement (nettoyage, désinfection et stérilisation, le cas échéant) et chacune de ces étapes doit être validée individuellement selon des normes et des critères spécifiques.
Pendant longtemps, la stratégie à mener pour valider les instructions de nettoyage d'un DM réutilisable n'était pas claire. La principale raison étant que l'ancienne norme technique AAMI TIR 30 n'était plus reconnue par la FDA depuis plusieurs années, sans avoir été toutefois archivée officiellement. En outre, les directives de l'agence américaine relatives au retraitement des DM ne faisaient aucune référence à une quelconque norme ISO, compliquant la situation pour les fabricants souhaitant viser plusieurs marchés.
Depuis la publication de la très attendue AAMI ST98, les validations de nettoyage ont désormais leur propre ligne directrice à suivre par les fabricants pour leurs soumissions réglementaires.
Une norme qui s’appuie désormais sur la classification des DM
Une analyse de risque doit obligatoirement être réalisée pour déterminer la classification d'un dispositif médical au regard de sa criticité. Cette analyse doit prendre en compte des facteurs tels que les caractéristiques physiques du dispositif, sa complexité et le challenge qu’elle représente vis-à-vis du nettoyage ainsi que les conditions réelles d'utilisation.
Cette analyse est ensuite utilisée tout au long du processus de validation du dispositif pour justifier de la pertinence de chaque choix stratégique effectué lors des essais en laboratoire, incluant le plan d’échantillonnage, la procédure de souillure, la sélection des marqueurs pertinents à analyser...
Les cycles d'utilisation simulée
Tous les éléments d'essai doivent être soumis, avant l’évaluation de l‘efficacité du nettoyage, à un minimum de cycles d'utilisation simulée, permettant de vérifier qu’un dispositif en fin de vie sera nettoyable aussi efficacement qu’un dispositif neuf. Ces cycles doivent comprendre toutes les étapes du retraitement prévues dans l’IFU (nettoyage, désinfection et stérilisation).
L'objectif de ces cycles est multiple :
- Reproduire l'usure réelle subie par les dispositifs au cours des cycles de retraitement successifs en conditions réelles ;
- Reproduire une potentielle accumulation des résidus de souillure tout au long des cycles de retraitement, ce qui peut avoir une incidence sur les taux résiduels détectés après nettoyage.
Trois cycles d'efficacité
Les éléments d'essai doivent être soumis à trois cycles d'efficacité indépendants, durant lesquels sont uniquement appliqués les phases de retraitement correspondant à l'étape de nettoyage.
Ces cycles visent à évaluer l'efficacité des seules étapes de nettoyage, les marqueurs sélectionnés étant analysés en point final. Les étapes de nettoyage sont réalisées dans les pires conditions (worst-case) pour couvrir toute mauvaise application des instructions par l’utilisateur. La sélection des paramètres exige une certaine expertise pour se situer dans une fourchette permettant d’être suffisamment "worst-case" pour justifier la stratégie de test sans engager la faisabilité de l’évaluation.
L’analyse des marqueurs résiduels
Afin de pouvoir évaluer l’efficacité du nettoyage pour les dispositifs critiques et semi-critiques, des analyses résiduelles de marqueurs spécifiques doivent permettre d'évaluer la présence de résidus potentiels de souillure organique.
Il est obligatoire de sélectionner deux marqueurs différents à analyser avec une méthode quantitative.
Les différents marqueurs existants ainsi que les critères d’acceptation correspondants sont listés dans l’AAMI ST98. Mais il est indispensable que la sélection de ces marqueurs soit faite en cohérence avec l'utilisation clinique réelle du dispositif. Par exemple, tout risque de contamination sanguine, qu'il soit négligeable ou uniquement possible suite à une mauvaise utilisation du dispositif, nécessite l’analyse du marqueur hémoglobine.
L’analyse résiduelle doit impérativement faire suite à une validation de l’efficacité et de la répétabilité de la méthode d’extraction de chaque marqueur, réalisée sur trois éléments d’essai et répondant aux critères définis dans l’AAMI ST98.
Le cas des DM non critiques
L’AAMI ST98 présente également une nouveauté, qui est de décrire une stratégie de test spécifiquement pour les dispositifs non critiques. L’efficacité du nettoyage peut ainsi être évaluée uniquement à l’aide d’une inspection visuelle, ce qui représente une démarche beaucoup moins lourde à mettre en œuvre pour des dispositifs dont le niveau de criticité ne justifie pas de faire plus.
L’AAMI ST98 précise les critères permettant une classification d’un dispositif médical comme non critique. En revanche, cette évaluation peut être remise en cause en cas de contact indirect entre dispositifs non critiques et patient, ou en cas de contact direct avec un autre dispositif critique ou semi-critique.
La norme ANSI/AAMI ST98 définit désormais beaucoup mieux la stratégie de validation de l'efficacité des instructions de nettoyage pour le retraitement d'un DM réutilisable et doit être suivie scrupuleusement pour envisager une soumission réglementaire.
Cette norme souligne également plus que jamais l’importance de prendre en compte les caractéristiques du dispositif et les conditions cliniques réelles de son utilisation dans la mise en place d’une stratégie de test.
Les fabricants doivent désormais réaliser une analyse de risque pertinente pour être en mesure de justifier tout choix stratégique de test.
La réalisation d'une validation de nettoyage nécessite donc une compréhension précise et totale des attentes de la nouvelle norme.
On notera que la norme ANSI/AAMI ST98 décrit les exigences pour l'acceptation par la FDA uniquement. L'absence de lignes directrices ISO ne clarifie pas la situation pour le marché européen. Néanmoins, sachant que la tendance actuelle est à la convergence des réglementations américaine et européenne, il semble évident que la norme ANSI/AAMI ST98 soit destinée à devenir une nouvelle norme internationale.