Matériaux métalliques : 5 paramètres à surveiller
Tout matériau métallique implantable nécessite une vigilance extrême. Cela est d'autant plus vrai qu'il est souvent utilisé en combinaison avec d'autres matériaux. Cet article recense les paramètres essentiels à surveiller à travers l'exemple du Nitinol, l'alliage à mémoire de forme titane nickel.
Par Philippe Marx, Ingénieur en matériaux, responsable du laboratoire d'essai de la société AMF.
Il n'existe aucun matériau n'exerçant absolument aucun effet défavorable sur le corps humain. Cet effet peut venir du matériau lui-même mais aussi de son usage. A titre d'exemple, un implant mal dimensionné peut induire des frottements de type métal/métal, donc engendrer des débris métalliques et provoquer une métallose, même si le matériau était biocompatible au départ. Autre cas de figure : lorsque deux alliages métalliques différents sont en contact, il y a toujours un risque d'effet de pile et donc de corrosion galvanique. Cette corrosion fait perdre la propriété de biocompatibilité de chacun des deux alliages.
Quelles sont les principales caractéristiques à surveiller ? Pour répondre à cette question, cet article se base sur l'exemple du Nitinol, connu pour sa biocompatibilité.
La composition chimique
Il s'agit du paramètre le plus important à vérifier. La norme ASTM F2063-05 pour le Nitinol précise les teneurs maximum de chaque élément. Ces données se résument assez simplement puisque cet alliage doit être composé uniquement de titane et de nickel (50/50), les autres éléments ne devant être présents que sous forme de traces. La norme évite ainsi l'usage, pour la réalisation d'implants, d'alliages ternaires tels que le TiNiFe ou TiNiCu donc la biocompatibilité n'est pas avérée. De même, trop d'oxygène fragilise l'alliage mais cela pourra être détecté par la limité à rupture Rm.
La taille de grain
Cette grandeur doit également être surveillée car elle fragilise le matériau lorsqu'elle est excessive (elle ne doit pas dépasser 4 pour le Nitinol). Cette propriété est rarement problématique pour le Nitinol si l'alliage a été transformé à froid car cela affine le grain.
Limite à rupture et porosité
Le limite à rupture permet de vérifier la résistance de l'alliage. Dans le cas du Nitinol, Rm doit être supérieure à 551 MPa avec un allongement de 10 à 15 % suivant les cas. Autres caractéristiques à contrôler : la porosité et le taux d'inclusion, ce qui pose rarement problème pour le Nitinol si l'alliage a été obtenu par fusion à l'arc sous vide en creuset froid. A noter qu'il subsiste toujours de la porosité résiduelle si par exemple la technique d'élaboration est la métallurgie des poudres.
L'état de surface
Enfin, l'état de surface est une propriété à ne pas négliger, même s'il est rarement précisé dans les normes. Un état de surface poli brillant par exemple n'offre aucune zone favorable à la germination de la corrosion. Les normes ne précisent jamais non plus les traitements de surface favorables à la biocompatibilité. Par exemple, dans le cas du Nitinol, il existe des traitements qui améliorent la quantité de la couche de TiO2 de surface, laquelle constitue une barrière infranchissable au relargage du nickel. De même, des traitements de vieillissement avant implantation permettent de retirer les quelques ions nickel de surface qui pourraient se trouver du mauvais côté de la barrière de TiO2.
Il incombe en fait au concepteur du dispositif d'aller au delà des normes et de proposer la meilleure biocompatibilité possible.