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Composants > Tubes, fils et flexibles

Des fibres textiles creuses pour une administration de médicament contrôlée

Publié le 10 décembre 2024 par Patrick RENARD
Les paramètres selon lesquels les fibres libèrent l'agent qu'elles contiennent ont d'abord été étudiés avec des substances modèles fluorescentes.
Crédit photo : Empa

Les chercheurs de l'Empa développent des fibres polymères pouvant contenir des médicaments en leur centre. Transformables en textiles médicaux, ces "fibres à noyau liquide" se présentent comme une solution prometteuse pour délivrer des principes actifs avec précision et sur une période prolongée.

L'idéal pour traiter une plaie ou une inflammation est de pouvoir le faire directement à l'endroit où elle se situe. Cela présente deux avantages évidents : le principe actif atteint immédiatement sa cible et il n'y a pas d'effets secondaires négatifs sur les parties du corps non concernées.

Les méthodes d'administration locales courantes, comme la pommade ou l'injection, atteignent toutefois leurs limites lorsqu'il s'agit de doser précisément des principes actifs sur une longue période. Dès qu'une pommade quitte le tube ou que le liquide d'injection s'écoule de la seringue, il n'est pratiquement plus possible de contrôler la quantité de principe actif.

Edith Perret au laboratoire "Advanced Fibers" de l'Empa, à Saint-Gall en Suisse (crédit photo : Empa).

Pour des textiles médicaux favorisant la médecine personnalisée

Désireuse de mettre au point une approche d'administration de médicaments locale plus efficace, Edith Perret, chercheuse au laboratoire "Advanced Fibers" de l'Empa, développe des fibres polymères aux "valeurs internes" très particulières : creuses, elles peuvent intégrer un noyau liquide contenant des principes actifs médicaux.

L'objectif est de pouvoir obtenir des produits médicaux comme des sutures chirurgicales, des pansements et des implants textiles capables d'administrer avec précision des analgésiques, des antibiotiques ou de l'insuline sur une longue période. Il s'agit en outre de permettre un dosage individuel au profit d'une médecine personnalisée.

A base de polycaprolactone, biocompatible et biodégradable

Un facteur décisif qui fait d'un textile un dispositif médical est le matériau de la gaine de la fibre. L'équipe de chercheurs a choisi le polycaprolactone (PCL), un polymère biocompatible et biodégradable qui est déjà utilisé avec succès dans le domaine médical. L'enveloppe fibreuse renferme le précieux produit, par exemple un analgésique ou un médicament à effet antibactérien, et le libère dans l'environnement au fil du temps.

Sur une installation pilote construite à cet effet, les chercheurs ont produit des fibres PCL avec un noyau continu de liquide au moyen d'un filage par fusion. Les premiers essais en laboratoire ont permis de créer des fibres chargées de liquide à la fois stables et flexibles. L'équipe d'Edith Perret avait déjà pu démontrer avec succès, en collaboration avec un partenaire industriel suisse, que ce procédé ne fonctionne pas seulement en laboratoire, mais aussi à l'échelle industrielle.

Les paramètres selon lesquels les fibres libèrent l'agent qu'elles contiennent ont d'abord été étudiés avec des substances modèles fluorescentes et finalement avec différents médicaments. « Les petites molécules, comme l'analgésique ibuprofène, se déplacent progressivement à travers la structure de la gaine extérieure », explique Edith Perret. « Les molécules plus grosses sont en revanche libérées aux extrémités des fibres ».

Un contrôle précis

« Grâce à une multitude de paramètres différents, les propriétés des fibres médicales peuvent être contrôlées avec précision », poursuit la chercheuse de l'Empa.

Microscopie électronique colorée d'un faisceau de fibres d'environ un millimètre de large, agrandi 80 fois (crédit photo : Empa).

Après des analyses approfondies par spectroscopie de fluorescence, tomographie à rayons X et microscopie électronique, les chercheurs ont par exemple pu démontrer l'influence de l'épaisseur de la gaine ou de la structure cristalline de son matériau sur le taux de libération des médicaments.

Le procédé de fabrication peut être adapté en fonction du principe actif. Les substances qui ne sont pas sensibles aux températures élevées lors du filage par fusion peuvent être intégrés directement dans le noyau des fibres au cours d'un processus continu. Pour les médicaments sensibles à la température, l'équipe a en revanche pu optimiser le procédé de manière à ce qu'un espaceur remplisse d'abord la partie centrale de la fibre, en vue d'être ultérieurement remplacé par le principe actif sensible, après le filage par fusion.

Une efficacité sur le long terme

Parmi les avantages des fibres à cœur liquide figure également la possibilité de libérer la substance active pendant une période prolongée. Il en résulte de nombreuses possibilités d'application. Avec des diamètres de 50 à 200 micromètres, les fibres sont par exemple assez grandes pour être tissées ou tricotées en textiles résistants. « Mais les fibres médicales pourraient aussi être introduites à l'intérieur du corps et y délivrer des hormones comme l'insuline », précise Edith Perret.

On notera un autre avantage intéressant de ces fibres "réservoirs" : après avoir libéré leur médicament, elles peuvent être remplies à nouveau.

L'éventail des principes actifs qui pourraient être administrés de manière simple, pratique et précise au moyen de fibres à cœur liquide est large. Outre les analgésiques, on peut imaginer des médicaments anti-inflammatoires, des antibiotiques ou même des préparations de bien-être.

Dans une prochaine étape, les chercheurs ont l'intention d'orienter leurs travaux pour aboutir à des sutures dotées de propriétés antimicrobiennes, afin de réduire sensiblement les risques d'infection des plaies consécutives aux opérations chirurgicales.

Edith Perret est en outre convaincue qu'une future collaboration avec des partenaires cliniques constituera la base d'autres applications innovantes.


www.empa.ch

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