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Robotique médicale : une filière d’avenir en Occitanie

Publié le 07 avril 2021 par Patrick RENARD
Deux leaders de la robotique médicale languedocienne : Anne-Marie Péchinot, directrice générale de Zimmer Biomet Robotics, et Bertin Nahum, CEO/fondateur de Quantum Surgical.
Crédit photo : Zimmer Biomet

Territoire d’innovation en santé, Montpellier s’affirme tout particulièrement comme un pôle d’attractivité autour de la robotique médicale. Au cœur de cet ancrage industriel, source d’emplois durable : le tandem Zimmer Biomet Robotics (ex-Medtech) et Quantum Surgical.

Il est de plus en plus question de ré-industrialisation en France, notamment dans le secteur de la santé, depuis que la crise sanitaire a révélé la dépendance de l’Hexagone à l’égard de biens fabriqués à l’étranger. Dans ce contexte, il est intéressant de constater ce qui se passe dans le Languedoc. Réputée notamment pour son tourisme et son agriculture, cette région ne fait pas partie de celles dont le bassin d’emploi industriel est très développé. En revanche, Montpellier est reconnue pour ses capacités d’innovation en matière de santé. On a pu le constater tout particulièrement avec la montée en puissance de la société Medtech, créée en 2002 par Bertin Nahum au sein de Cap Omega, l’incubateur des start-up innovantes de Montpellier. L’objectif de l'entrepreneur franco-béninois était de développer une technologie d’assistance robotisée dédiée à la chirurgie mini-invasive du cerveau et de la colonne vertébrale. C’est ainsi qu’est née Rosa, en 2007. Il s’agit d’une plateforme intégrée multi-applicative basée sur un bras robotisé à guidage laser, avec six degrés de liberté.

Robot d’assistance à la chirurgie, ROSA Knee System (source Zimmer Biomet).

Couronnée de succès, la technologie de Medtech séduit le groupe américain Zimmer Biomet, qui rachète l’entreprise en 2016. Rebaptisée Zimmer Biomet Robotics, elle devient la cellule dédiée à la robotique chirurgicale du groupe américain en conservant son siège montpelliérain et sa cinquantaine de salariés. « Le rachat a pu se faire avec la conviction qu’il y avait un vrai projet industriel dans lequel la volonté de pérenniser l’activité sur le territoire était bien présente », souligne Bertin Nahum, pour qui cet aspect était crucial. Depuis le rachat de Medtech, Zimmer Biomet a effectivement beaucoup investi sur le site de Montpellier en moyens humains et de production.

Après quelques mois passés chez Zimmer, Bertin Nahum se lance, en 2017, dans une nouvelle aventure en créant Quantum Surgical, accompagné d'anciens collaborateurs de Medtech devenus associés. Objectif : répondre, toujours avec la robotique, aux besoins des médecins en oncologie et plus particulièrement en ce qui concerne le cancer du foie. « C’est le 6ème cancer en termes de fréquence, et malheureusement le 2ème en termes de mortalité », précise Bertin Nahum. « Il concerne plus de 800000 nouveaux patients par an dans le monde, dont 8000 en France. Il y a donc fort à faire pour proposer des solutions visant à traiter les patients de façon plus efficace. C’est un parcours ambitieux qu’on veut pousser le plus loin possible. »

300 emplois à forte valeur ajoutée

Aujourd’hui, Quantum Surgical emploie 80 personnes et prévoit de recruter une trentaine de salariés en 2021. La dynamique est tout aussi positive pour Zimmer Biomet Robotics, qui ne va pas tarder à dépasser les 200 employés. Sa forte croissance se traduit par la nécessité d'étendre ses locaux de 2500 à 4500 m2, avec l’emménagement dans un nouveau bâtiment qui regroupera les activités de R&D et de production, toujours dans la métropole montpelliéraine. « Nous allons faire de ce nouveau bâtiment un centre d’excellence pour pouvoir accueillir beaucoup plus d’acteurs de la filière médicale », explique Marie-Anne Péchinot, directrice générale de Zimmer Biomet Robotics.

Si Quantum n’est pas encore entré en phase de production intensive, les ateliers de Zimmer Biomet Robotics tournent à plein régime, avec 200 robots produits par an. Il s’agit donc bien d’une véritable activité industrielle, avec des dispositifs commercialisés aux 4 coins du globe. Et comme le souligne Bertin Nahum, « les emplois créés par nos deux sociétés ne sont pas délocalisables car à forte valeur ajoutée ».

Des effets vertueux

Quantum Surgical et Zimmer Biomet Robotics entretiennent des liens étroits, sachant que les deux entreprises sont voisines, font face à la même problématique en matière de robotique, et ne sont pas en concurrence puisque positionnées sur des pathologies différentes. « Nous échangeons les bonnes pratiques de façon régulière, » précise Bertin Nahum. « Nous travaillons ensemble pour créer des compétences, un savoir-faire, des formations à forte valeur ajoutée, avec un cercle vertueux qui doit permettre de voir fleurir d’autres initiatives. »

La jeune filière robotique montpelliéraine s’est ainsi récemment enrichie de la start-up AcuSurgical, spécialisée dans l’assistance robotisée à la chirurgie rétinienne. L’entreprise a reçu le Grand Prix i-Lab 2020, avec un financement de 270 K€, et vient de lever 6 M€ en Série A.

« Cela montre que nous sommes capables d’ancrer de façon durable des activités sur notre territoire », ajoute Bertin Nahum.

« L’essor de cette filière robotique a d’ailleurs un effet vertueux au niveau sociétal », explique Marie-Anne Péchinot. « Elle va irriguer des formations en école d’ingénieur et favoriser des partenariats avec des laboratoires ; elle est aussi synonyme de valorisation du travail et de hausse des salaires moyens ».

Au niveau de l’Occitanie, la filière robotique médicale représente un relais d’emploi pour la filière aéronautique sur le bassin de Toulouse, qui est gravement touchée. « Il s’agit de profils de techniciens et d’ingénieurs qui sont très proches de ce que l’on recherche », souligne Marie-Anne Péchinot. « Une partie de nos recrutements vient de cette filière aéronautique ».

Un même fournisseur de robots

Baptisé Epione, comme la déesse grecque ("celle qui soulage les maux"), le robot de Quantum Surgical dédié aux traitements mini-invasifs du cancer du foie a donné lieu à un premier essai clinique couronné de succès (source Quantum Surgical).

On notera que Quantum Surgical et Zimmer Biomet Robotics partagent également le même fournisseur en matière de bras robots. Il s’agit de Stäubli avec lequel un partenariat stratégique a été noué. Le fabricant savoyard bénéficie ainsi des retours de ses deux clients pour définir les spécifications de conception des nouvelles générations de bras robotisé pour le médical, notamment en matière d’ergonomie.

Le robot n’est pas le seul élément made in France. « Nous avons fait une analyse sur les 800 composants de notre dispositif », explique Mme Péchinot.  « Il s'avère que 80 % d’entre eux sont d’origine française, le reste étant essentiellement d’origine européenne ». On notera que si le robot est évidemment essentiel dans un dispositif robotisé, la valeur ajoutée et la différence entre les solutions proposées reposent sur le logiciel. Stratégique, ce composant est développé en interne, chez Quantum Surgical comme chez Zimmer Biomet Robotics.

Des effets de la crise limités, voire positifs

Interrogée sur l'impact de la crise sanitaire sur Zimmer Biomet, Marie-Anne Péchinot explique que les déprogrammations des chirurgies se sont fait ressentir de façon globale, mais qu'il y a eu un effet positif sur ce qu'elle appelle la filière high-tech du groupe. « On vit une véritable mutation en passant de l’âge des implants à celui des data et de la robotique », précise-t-elle. « La crise a eu un effet d’accélérateur sur les développements relatifs à la médecine à distance, notamment au travers du partenariat avec Apple (MyMobility) ». Il s'agit d'une application qui permet de suivre les patients à distance via des appareils comme l’Apple Watch.

« On s'aperçoit encore plus de l’importance de limiter les séjours des patients dans les hôpitaux pour éviter de les engorger, mais aussi pour réduire les risques d’infections nosocomiales », poursuit Marie-Anne Péchinot. « Cela favorise tout ce qui concerne les soins ambulatoires, la e-santé et le mini-invasif ».

La robotique médicale a elle aussi le vent en poupe, avec un accroissement de la demande. Marie-Anne Péchinot avance ici une raison simple : « les chirurgiens orthopédiques ne pouvant pas opérer, ils ont davantage de temps pour se pencher sur les avancées technologiques, et aller plus loin dans les enquêtes d’investissement en équipements ».

Pour Quantum Surgical, l'objectif, en 2020, était de lancer un essai clinique multicentrique autour de son robot médical Epione. En dépit de la crise qui a quelque peu ralenti le processus, l'essai a pu débuter en juin, et s'achever avec succès en février dernier. Le principal objectif est maintenant la certification réglementaire pour la commercialisation en Europe. En bonne voie, le marquage CE sera l'un des premiers à être obtenu au titre du nouveau règlement européen (2007/745), avec le Tüv Rheinland comme organisme notifié.


quantumsurgical.com, www.zimmer-biomet.fr, www.staubli.com

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