Industrie medtech : un optimisme tempéré par les changements réglementaires
Le 11ème rapport LIMEDex confirme, avec un indice de 8,3 points, le regain d’optimisme des entreprises medtech, entamé en début d’année. Un optimisme que risquent de réfréner les coûts induits par les nouveaux règlements européens.
Compilés depuis janvier 2015 par Conceplus, les rapports LIMEDex se succèdent tous les trois mois pour fournir des instantanés (ou presque) de l’état d’esprit des entreprises medtech. Le dernier en date, publié en octobre dernier à partir des données d’août 2017, fait apparaitre un indice de confiance de 8,3 points. C’est un nouveau record après ceux déjà observés dans les rapports précédents d’avril (4,9 points) et juillet (6,6 points). L’indice n’avait d'ailleurs jamais dépassé la barre des 4 points durant les deux premières années de son existence.
Rappelons que cet indice LIMEDex est savamment calculé à partir des prévisions sur les 12 mois à venir, fournies par les entreprises interrogées, en matière de performances commerciales, opérationnelles et financières. Plus de 125 entreprises internationales de toutes tailles se prêtent désormais au jeu de cette étude.
Un regain d’espoir chez les managers du MedtechSi on regarde plus en détail les indicateurs de performance qui forment l’indice LIMEDex, on constate que l’optimisme repose en particulier sur la croissance soutenue du volume de commandes enregistrées et sur un meilleur accès aux marchés d’exportation. En regardant les indices sous-jacents (voir l'illustration principale), on relève que la confiance des managers dans les opérations d'exploitation a atteint un sommet avec 12,3 points (contre 7,8 points un an auparavant). Les perspectives d'accès au marché qui concerne la performance commerciale (entrées de commandes, force de vente, barêmes de prix...) restent moins optimistes que dans la première étude en 2015, mais continuent de s'améliorer pour revenir à -14,8 points (contre -16 points un an auparavant). Enfin, les perspectives financières sur les 12 prochains mois sont au plus haut avec 2,6 points (contre 1,6 points un an auparavant), reflétant un niveau élevé d'activité commerciale.
Mais cet optimisme global est tempéré par la perception d’un risque accru et l'anticipation des défis que représentent les nouveaux règlements de l'UE. Cela explique que les industriels prévoient, pour les 12 prochains mois, une croissance moyenne des ventes de "seulement" 3,6 % (contre 4,3 % un an auparavant).
Un coût de mise en conformité équivalent au budget de R&D des entreprises ?
Une très grande majorité des managers interrogés (94 %) font état d’un impact important des futures exigences réglementaires de l’UE sur leurs entreprises, en termes de coût, de temps et de ressources humaines. Conceplus a fait des recherches primaires et secondaires sur le sujet. Il en ressort que l'écosystème medtech européen serait confronté, au cours des trois prochaines années, à un coût opérationnel estimé à 18,8 Md$, dont 16 Md$ pour les PME . Rappelons que le marché européen des medtech s’élevait à 110 Md$ en 2015 avec une part de R&D estimée à 6,5 %. Selon l’estimation de Conceplus, le coût annuel de la mise en conformité à la nouvelle réglementation (6,3 Md$) pourrait donc consommer une très grosse partie, voire l'ensemble du budget de R&D des entreprises.
"L'impact sur le résultat opérationnel (EBIT) est estimé à -4,0 % pour les 24 prochains mois", précise Beatus Hofrichter, fondateur de Conceplus et auteur des rapports LIMEDex.
Par ailleurs, l’application de la nouvelle réglementation se traduit par un besoin important, dans l'ensemble de l’Europe, en personnel qualifié. Conceplus estime que ce besoin nécessite le recrutement de 31000 employés à temps plein pour les affaires réglementaires. La pénurie de compétences dans ce domaine est donc inévitable.
« Dans le rapport, nous avons compilé 12 options tactiques pour faire face à cette pénurie», souligne M. Beatus Hofrichter. « En tout cas, il est peu probable que le coût de la mise en conformité puisse être entièrement évité. Les nouvelles exigences réglementaires commencent d'ailleurs à affecter les perspectives d'investissement. Si la tendance reste positive dans ce domaine, on constate un léger ralentissement. »
Malgré ces nuages menaçants, la majorité des managers, confiants dans la croissance des ventes et l’exécution des commandes, se montrent certains de traverser la tempête à condition de contrôler étroitement leur flux de trésorerie. Avec la croissance régulière qui la caractérise, l’industrie medtech devrait être en mesure de supporter les contraintes de cette transition vers la nouvelle réglementation, semblable à celle de l’industrie pharmaceutique. L'effort supplémentaire sera rude pour de nombreux acteurs, mais il offre également une opportunité pour certaines entreprises de renforcer les "preuves cliniques" de leur valeur pour faire face à la concurrence.