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Côté recherche

Deux heures au lieu de huit pour trouver le bon antibiotique

Publié le 06 juin 2023 par Patrick RENARD
On distingue les guides optiques sur lesquels est déposée la goutte qui contient les bactéries.
Crédit photo : CEA

Aujourd’hui, il faut au moins huit heures pour valider l’efficacité d’un antibiotique sur une infection. Les chercheurs du CEA-Leti espèrent y parvenir en deux heures grâce à une méthode d’analyse inédite, basée sur une "pince optique". Ce projet de R&D nommé SUPPLY doit donner naissance à un prototype de laboratoire.

Quand un patient est victime d’une infection grave, les médecins doivent trouver au plus vite l’antibiotique qui viendra à bout de la bactérie responsable de la maladie. Or, avec la culture en boîte de Petri, cette recherche prend actuellement au moins 8 heures, voire parfois jusqu’à 24 heures.

Deux équipes du CEA (Leti et Irig) avec le LTM (Laboratoire des technologies de la microélectronique) de Grenoble ont conçu une "pince optique" à bactéries, qui devrait permettre de parvenir au même résultat, avec une fiabilité identique, en seulement deux heures.

Observer le stress oxydatif de la bactérie

Il s’agit là d’un nouveau paradigme. « Attendre de voir si une bactérie soumise à un antibiotique continue à pousser, c’est très long », explique Pierre Marcoux, ingénieur chercheur au CEA-Leti. « Nous proposons pour notre part d’observer son stress oxydatif. Si la bactérie est sensible au traitement, sa membrane se charge très vite en fonctions oxygénées et change d’indice de réfraction. »

Cavités en silicium formant le piège optique (source CEA).

C’est pour détecter cette transformation qu’a été conçue la pince optique, qu'on pourrait qualifier aussi de piège optique basé sur des cavités en silicium. Ce dispositif comprend deux micromiroirs entre lesquels un faisceau laser rebondit des milliers de fois, avant de s’échapper. Cette résonance crée une force qui attire les bactéries proches ; en retour, celles-ci modifient la fréquence de résonance, de manière différente selon qu’elles sont saines ou oxydées.

Cette détection est quasi instantanée. Mais elle doit porter sur de multiples bactéries pour que la mesure soit fiable. Ce qui explique les deux heures annoncées.

Vers un appareil simple à régler et à utiliser

Cette technique a déjà fait ses preuves sur des bactéries soumises à des températures de plus en plus élevées. Il faut maintenant la perfectionner et l’évaluer pour des bactéries confrontées à des antibiotiques. C’est l’objet du projet de recherche franco-suisse SUPPLY. Il réunit le CEA, le LTM, l’EPFL (École polytechnique fédérale de Lausanne) et le CHUV (Centre hospitalier universitaire vaudois). Son but : proposer un prototype aux laboratoires de biologie dans quatre ans.

« Il faut bien sûr valider notre paradigme », précise Pierre Marcoux. « S’assurer que l’observation du stress oxydatif prédit l’efficacité d’un antibiotique avec la même fiabilité qu’une culture en boîte de Petri. Et développer, en parallèle, un appareil simple à régler et à utiliser, aisément manipulable par un biologiste ».

Un outil pour prévenir les antibiorésistances

SUPPLY se penchera également sur un second type de pince optique, imaginé par les chercheurs de l’EPFL.

Le projet sera suivi avec intérêt par les cliniciens qui réclament depuis 20 ans des outils plus performants pour cibler les antibiothérapies. Car aujourd’hui, en attendant le verdict de la boîte de Petri, ils sont contraints d’administrer des antibiotiques à large spectre. Ce qui aggrave le risque à long terme d’antibiorésistances, sans forcément soulager le patient.


www.leti-cea.fr

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